CANCERS GYNECOLOGIQUES ET MAMMAIRES A LA MATERNITE ISSAKA GAZOBY DE NIAMEY NIGER

CANCERS GYNECOLOGIQUES ET MAMMAIRES A LA MATERNITE ISSAKA GAZOBY DE NIAMEY NIGER

Nayama.M, (1), Idi.N (1), Garba.M (1), Saloufou.S (1),  Oumara.M (1),  Guédé.M (1), Tidjani- Dikouma.F(1), Chekarou Laouli M(1),  Soumana Ali A (1),  Maiga O (1), Mahamadou-Zaki.H (2),  Nouhou.A (2).

  1. Gynécologue Obstétricien, Maternité Issaka Gazoby de Niamey
  2. Anatomopathologiste, Faculté des Sciences de la Santé (FSS), Niamey

Contact : Pr Madi NAYAMA. Gynécologue Obstétricien. Enseignant Chercheur FSS/UAM. Médecin Chef Maternité Issaka Gazoby Niamey. Email : madinayama@hotmail.com

INTRODUCTION

L’augmentation sensible de l’espérance de vie, les modifications des modes de vie notamment dans les pays en développement le vieillissement de la population et l’évolution de la prévalence de certaines maladies, entraîneront une recrudescence des cancers et des autres maladies chroniques non transmissibles. Selon le rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 2018, le cancer est une cause majeure de décès dans le monde [1-3]. Sur un total de 40 millions de décès enregistrés au niveau mondial, 9.6 millions étaient dus au cancer. Plus de 70% de ces décès par cancer étaient survenus dans des pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire. D’après les projections, le nombre des cas de cancer devrait continuer à augmenter dans le monde : 11,4 millions en mourront en 2030.

Les cancers gynécologiques et mammaires sont aussi une cause majeure de décès dans le monde. Sur les 9.6 millions de décès enregistrés dans le monde, 627 000 décès étaient dus au cancer du sein et 311 365 décès liés au cancer du col utérin.

Les cancers, un problème de santé publique, peuvent être prévenus dans plus de 30% des cas, dépistés et traités à temps pour diminuer leur incidence et leur taux de mortalité [1-3].

La santé en matière de reproduction est actuellement un concept global et la lutte contre les cancers, est devenue une préoccupation dans beaucoup de pays africains, dont le Niger, compte tenu de la gravité de la situation.

Notre étude a pour objectif d’analyser la prise en charge des cancers gynécologiques et mammaires à la maternité Issaka Gazoby de Niamey, Niger, en vue d’élaborer des recommandations adaptées pour améliorer le pronostic des patientes. Nous avons réalisé une étude rétrospective des cas de cancers gynécologiques et mammaires pris en charge à la maternité Issaka Gazoby de Niamey (maternité de référence du Niger) sur une période de 10 ans et 9 mois (01 Janvier 2010 au 30 Septembre 2020).

I. EPIDEMIOLOGIE DES CANCERS GYNECOLOGIQUES ET MAMMAIRES

1.1. Incidence/Mortalité

L’analyse des incidences des cancers en 2018, nous permet de constater que le cancer du sein occupe la  première place des cancers gynécologiques et mammaires dans le monde avec 2 millions de nouveaux cas enregistrés. L’incidence du cancer du sein a varié de 95 cas pour 100 000 femmes pour les pays développés à 25 cas pour 100 000 femmes pour les pays à ressources limitées. Le cancer du sein demeure la  1ère  cause de mortalité par cancer chez la femme: 627 000 décès, soit 1 718 décès par jour, 1.2 décès par minute dans le monde en 2018.

 Le cancer du col utérin selon les données de 2018, a une incidence beaucoup plus importante en Afrique (il occupe  le 2ème rang des cancers gynécologiques et mammaires avec une incidence d’environ 15 cas pour 100 000 femmes) que dans le monde, où il occupe la 4ème position avec une incidence d’environ 13,2 cas pour 100 000 femmes).

Au Niger, il existe un registre de cancer qui existe depuis 1992 [4,5], un plan cancer au niveau du Ministère de la Santé Publique et une direction qui s’occupe des cancers depuis 2010, témoins de l’implication des autorités politiques [6,7]. Les partenaires techniques au développement (OMS, UNFPA, UNICEF) œuvrent beaucoup avec les autorités politiques, les sociétés savantes, les associations et les Ongs de lutte contre le cancer pour une meilleure prise en charge des patientes. La Fondation Tattali Iyali de la 1ère Dame du Niger, Dr Malika Issoufou, contribue beaucoup pour une meilleure prise en charge des patientes présentant des cancers gynécologiques et mammaires.

Les maternités de nos régions, outre la charge du travail imposée par les urgences obstétricales et gynécologiques, doivent aussi prendre charge les patientes présentant des cancers gynécologiques et mammaires. La maternité Issaka Gazoby de Niamey, avait enregistré 3024 cas de cancers gynécologiques et mammaires, durant la période de notre étude (tableau No I). En moyenne 275 cas de cancers sont enregistrés chaque année dans notre service, avec des extrêmes allant de 192 à 328 cas. Le cancer du sein était le cancer le plus enregistré (1329 cas, 43.95%), suivi du cancer du col utérin (735 cas, 22.30%) et les maladies trophoblastiques gestationnelles (589 cas, 19.50%). Nous avons noté une augmentation de la fréquence du cancer du sein (97 cas en 2010 et 156 cas en 2019), témoin d’une meilleure implication des autorités politiques, des prestataires, des Ongs, des associations et de la population. La fréquence du cancer du col utérin est stable (53 cas en 2010 et 30 cas en 2018), témoin des efforts réalisés pour la prise en charge des lésions précancéreuses du col utérin au Niger depuis 2001.

1.2. Facteurs de risque

1.2.1. Cancer du sein

L’âge étant un facteur de risque important du cancer du sein (facteur de mauvais pronostic si l’âge est inférieur à 35 ans. En Europe et aux États-Unis, le cancer sein touche essentiellement des femmes d’âge moyen entre 50 et 70 ans, il est peu fréquent chez les femmes jeunes. Les patientes de moins de 35 ans ne représentent que 2 à 5 % de l’ensemble des femmes atteintes de ce cancer [6-8]. En Afrique sub-saharienne, l’incidence du cancer du sein est faible chez les femmes âgées. L’âge moyen du cancer du sein est aux alentours de 45 ans avec un pic entre 35 et 45 ans. Au Niger,  l’âge moyen des patientes était de 46.8 ans avec des extrêmes allant de 18 à 91 ans et 74,4% des patientes avaient moins de 50 ans. Cette différence peut s’expliquer du fait que les populations africaines sub-sahariennes ont actuellement une espérance de vie plus courte que celle des populations des pays industrialisés. L’analyse des autres facteurs de risque du cancer du sein en Afrique sub-saharienne, montre qu’il touche généralement des patientes qui avaient un âge relativement tardif d’apparition des menstrues, des grossesses précoces, des grandes multipares, une durée d’allaitement maternel plus longue, une pratique peu courante de thérapeutique de substitution hormonale de la ménopause. Ces patientes étaient donc moins exposées aux estrogènes par rapport aux patientes des pays industrialisés. La fréquence importante du cancer du sein chez les patientes africaines à un âge jeune, pose le problème des facteurs génétiques (mutations sur les gènes de prédisposition au cancer du sein BRCA1 et BRCA2).Les facteurs génétiques ne sont pas encore été réellement explorés en Afrique sub-saharienne pour des raisons techniques (manque d’équipement, absence formation du personnel), des problèmes financiers et une insuffisance d’information sur le cancer du sein par les professionnels de santé et les Ongs [6-11]. Des études épidémiologiques sur la survenue du cancer chez les femmes jeunes devraient être menées dans nos régions surtout compte tenu des changements des habitudes alimentaires (consommation élevée de graisses animales saturées, alimentation pauvre en fruits et légumes et riche en viande), une insuffisance d’activité physique, une recrudescence du tabagisme, une forte proportion de mariage consanguin, la survenue des cancers familiaux et  des cancers du sein chez le sexe masculin.

1.2.2. Cancer du col utérin

Au Niger, l’âge moyen de survenue du cancer du col utérin était de 55.45 ans. Notre résultat est similaire  avec ceux de la littérature régionale [4,5]. Les patientes dont l’âge est compris entre 40 et 59 ans étaient les plus touchées (46,4%) dans notre étude, avec des extrêmes allant de 28 à 80 ans. Le facteur majeur de risque du cancer du col de l’utérus est l’infection par le virus du papillome humain (VPH) qui survient en général au cours de l’adolescence après les premiers rapports sexuels. En Afrique, la prévalence de l’infection à VPH atteint 21,3 % avec des variations notables en fonction des régions : 33,6 % en Afrique de l’Est, 21,5 % en Afrique de l’Ouest et 21 % en Afrique Australe. Les facteurs potentiels, dans la littérature africaine, qui augmentent le risque d’infection par VPH, virus dont certains types sont fortement oncogènes, demeurent : la précocité des rapports sexuels, les partenaires sexuels multiples. Le nombre de grossesses multiples et la multiparité s’accompagnent d’un risque significativement élevé dans nos régions. Les nombreuses grossesses par leur traumatisme répété qu’elles occasionnent, entrainent des remaniements de l’architecture du col utérin qui évoluent vers un état dysplasique en présence d’infection à VPH. L’incidence importante de l’infection VIH en Afrique entraine l’apparition d’un cancer du col utérin de plus en plus chez des femmes jeunes, cancer qualifié de « cancer opportuniste », cancer qui a une évolution plus rapide compte tenu du contexte d’immunodépression [1-3].

1.2.3. Cancer de l’ovaire

Les cancers de l’ovaire représentent l’un des problèmes les plus difficiles de la pathologie gynécologique étant donné son polymorphisme clinique et histologique. Le cancer épithélial de l’ovaire représentait, en 2000 en France, avec 4 400 nouveaux cas par an, la 5ème cause de cancer féminin après les cancers du sein, colorectaux, de l’endomètre, et du poumon. Le taux d’incidence standardisé a été estimé à 8,1/100000 femmes par an. Au niveau mondial, les incidences sont plus élevées dans les pays d’Amérique du Nord et d’Europe (9 à 15,5 cas pour 100 000 femmes) que dans les pays sous-développés et en Asie. L’incidence reste faible en Afrique avec une incidence de 4 à 7 cas pour 100000 femmes [1,2, 3,12]. Selon le registre du cancer au Niger, 8,8% des patientes présentaient un cancer de l’ovaire. Dans notre série, l’âge moyen des patientes était de 45,3 ans avec des extrêmes allant de 25 à 80 ans, 53% des patientes avaient un âge inférieur à 50 ans.

1.2.4. Cancers de l’endomètre.

Le cancer de l’endomètre a une incidence de 13,6 à 20 cas pour 100 000 femmes dans le monde, il est le 3ème cancer de la femme après les cancers du sein et du col utérin. Le cancer de l’endomètre est une maladie de certains pays riches avec des incidences maximales en Amérique du Nord et en Europe de l’Ouest, et une faible incidence au Japon et dans les pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine. L’incidence de cancer de l’endomètre dépend de l’âge de la patiente : 12 cas pour 100000 femmes à 40 ans, et 84 cas pour 100000 femmes à 60 ans [4,5]. Dans notre série, l’âge moyen des patientes était de 58,26 ans avec des extrêmes allant de 41 à 70 ans. Le caractère hormonodépendant  de ce cancer doit nous inciter à plus le diagnostiquer dans nos régions, surtout compte tenu des modifications de nos habitudes alimentaires.

1.2.5. Cancers de la vulve et du vagin

Les cancers de la vulve et du vagin, d’apparition tardive (55 à 85 ans) sont rares sur le plan international même si les tumeurs de la vulve (3 à 5% des cancers gynécologiques) sont de deux à trois fois plus fréquentes que celles du vagin [4,5]. 

1.2.6. Maladies trophoblastiques gestationnelles (MTG)

Les MTG comprennent un large spectre de pathologies du placenta allant des lésions précancéreuses bénignes (grossesses molaires), aux lésions malignes (tumeurs trophoblastiques gestationnelles : TTG). Les MTG sont des pathologies tumorales liée à la fécondation et doivent mieux dépistées dans nos régions surtout compte de la survenue des TTG qui ont un fort potentiel métastatique et sont mortelles en l’absence de traitement. La répartition géographique des MTG est très variable : tumeur beaucoup plus rare dans les pays occidentaux (Amérique du Nord, Europe et Australie) qu’en Asie, Afrique et Amérique Latine (fréquence de 0.6 à 1.1 pour 1000 grossessescontre 1 cas pour 200 à 500 grossesses) [4,5]. Dans notre série, elles occupent le 3ème rang des cancers avec une fréquence de 19.50%.L’incidence des MTG est de 0.70% par rapport au nombre d’accouchement dans notre service, la  moyenne d’âge des patientes était de 28,4 ans avec des extrêmes allant de 15 à 52 ans, la majorité des patientes avaient une tranche d’âge de 25 à 29 ans (24,6%).La gestité moyenne était de 4,83 avec des extrêmes allant de 0 à 14, les grandes multigestes (gestité supérieure à 5) sont les plus touchées : 36,7%.

II. DIAGNOSTIC POSITIF

Examen clinique

Les cancers gynécologiques et mammaires en Afrique de l’Ouest en général, sont diagnostiqués à un stade avancé [4-8]. Le retard au diagnostic a plusieurs explications :

  • niveau socioéconomique faible des populations concernées (faible taux de scolarisation de la femme,
  • faible pouvoir de décision de la femme à consulter,
  • mauvaise implications des hommes et de la communauté),
  • insuffisance de campagne d’information et de sensibilisation sur le cancer et une insuffisance de campagne de dépistage.
  • difficulté d’accès aux soins de qualité est aussi incriminée compte tenu  d’un manque de spécialistes du cancer, une mauvaise répartition des ressources (concentration dans les grandes villes), un déficit en technologie adaptée (insuffisance de mammographe, insuffisance des laboratoires d’anatomopathologie et de cytologie).
  • manque de programme cancer au niveau national et l’insuffisance des ressources allouées à la santé de la reproduction (besoins non satisfaits importants) sont des facteurs expliquant la consultation tardive des patientes, offrant ainsi peu de chances de guérison des cancers gynécologiques et mammaires.

2.1.1 Cancer du sein

Au Niger, comme dans la plus part des pays de l’Afrique de l’Ouest, les patientes consultent tardivement pour la prise en charge du cancer sein. Le délai moyen de consultation était de 9 mois, entre le début des symptômes cliniques et la consultation à la maternité Issaka Gazoby de Niamey, avec des extrêmes allant de 15 jours à 5 ans. Ce retard de consultation est beaucoup plus important chez des patientes qui consultent en premier les tradithérapeutes, compte tenu de certaines croyances socioculturelles dans nos régions. Les signes fonctionnels sont dominés par les modifications mammaires (75%) et les douleurs mammaires (47,7%). Les signes d’examen sénologique, représentés, sont dominés par la présence d’une masse palpable (85% des cas), la présence d’un aspect de peau d’orange (65% des cas) et des adénopathies axillaires palpables (82% des cas). Malgré la politique de dépistage du cancer du sein par la mammographie depuis 2007, le diagnostic précoce du cancer du sein à évolution locale n’est pas fréquent, nous avons dénombré que 37,7 % des patientes diagnostiquées au stade 1 et 2. Il est admis que les cancers du sein de la femme en Afrique sub-saharienne ont des caractéristiques de tumeurs le plus souvent agressives (patientes jeunes, sein inflammatoire, envahissement ganglionnaire fréquent). Dans nos régions, la majorité de nos patientes qui avaient un cancer du sein, sont en âge de procréer et les consultations prénatales (CPN) demeurent souvent les seules occasions d’un examen sénologique. Dans notre série, 3% avaient une grossesse associée au cancer du sein

2.1.2 Cancer du col utérin

Au Niger comme dans beaucoup de pays de la sous-région, il  existe une politique de dépistage du cancer du col utérin par la méthode d’inspection visuelle après application de solution d’acide acétique à 5%  (IVA) et de soluté de Lugol fort (IVL),  au niveau de la région de Niamey et dans les autres régions depuis 2001. La majorité des patientes (80%) admises au niveau de la maternité Issaka Gazoby ne provenaient pas des centres de dépistage [19]. Le délai moyen de consultation était de 10 mois, avec des extrêmes allant de 1 à 60 mois, en cas de cancer du col utérin. Les signes fonctionnels du cancer du col utérin sont dominés par les métrorragies (77,7%), les douleurs pelviennes (37,7%) et les leucorrhées (18,8%). Dans notre série, seules 25% des patientes étaient au stade I.

2.2. Examen anatomopathologique

Le diagnostic anatomopathologique pose également d’énormes problèmes dans la plupart des pays du continent africain [4-8]. La majorité des laboratoires d’anatomie pathologique n’existe que dans les capitales. Il existe très peu de médecins anatomopathologistes dans nos régions. Le délai d’obtention des résultats histologiques est trop long, la situation est très pénible pour les patientes et les praticiens. Les examens extemporanés des pièces opératoires sont rares. Le recours à la technique de cytoponction, qui permet d’avoir un résultat cytologique dans un délai bref, est très utilisé dans nos régions. Les laboratoires pratiquent peu d’examen en immuno-histochimie pour la détection des récepteurs hormonaux ou pour des études moléculaires plus poussées. La majorité des équipes collabore avec des équipes européennes, américaines et du Maghreb avec comme corollaire l’envoi des blocs de tissus et des coûts supplémentaires pour la prise en charge des patientes. Au Niger, il existe un seul service d’anatomopathologique qui est basé à la Faculté des Sciences de la Santé de Niamey.

III. TRAITEMENT

3.1. Traitement curatif 

La prise en charge des cancers dans nos régions rencontre beaucoup de difficultés [4-8]. Les centres de traitement du cancer sont rares. Dans la majorité des cas, les patientes sont traitées dans des maternités de références, les hôpitaux nationaux et les cliniques privées. Les blocs opératoires sont partagés avec les autres pathologies obstétricales et gynécologiques, alourdissant la durée de séjour des patientes. Les maisons de vie pour les patientes sont inexistantes, les patientes sont dispersées dans les différents services.

Les praticiens de nos régions manquent de compétence pour le traitement du cancer. Les chirurgiens oncologiques et les chimiothérapeutes sont rares dans nos régions. Les infirmiers et le personnel de l’action sociale ont peu de compétences dans la prise en charge des cancers.

La radiothérapie, indispensable pour le traitement des cancers, n’est disponible dans tous les pays africains. Au Niger, la finition de la construction du service de radiothérapie traine beaucoup.

Les produits pour la chimiothérapie manquent dans nos régions, les protocoles ne sont pas adaptés compte tenu de l’absence de dosage des récepteurs hormonaux pour le cancer du sein.

Les soins palliatifs nécessaires à ce stade de la maladie ne sont que très peu disponibles dans nos régions. Dans nos régions, beaucoup de patientes partent en évacuation sanitaire, dans les pays du Maghreb ou Occidentaux, compte tenu de la performance des plateaux techniques. Ces évacuations sanitaires à la charge des états ou de la famille de la patiente, occasionnent des dépenses financières importantes (manque d’assurances maladies). 

En dehors des problèmes d’infrastructures et d’équipements, de compétence et de la disponibilité des produits thérapeutiques, le problème crucial dans la prise en charge des cancers gynécologiques et mammaires est leur découverte au stade tardif dans nos régions. En effet, des stades avancés de la maladie, très peu de patientes étaient opérées. Dans notre service,  la chirurgie première avait réalisée chez  seulement 40% des patientes présentant un cancer du col utérin et 55% des cas pour le cancer du sein. Les traitements néo adjuvants ou en situation métastatiques sont les plus réalisés. La mastectomie totale avec curage axillaire systématique demeure le traitement chirurgical du cancer du sein le plus largement utilisé dans nos régions. Dans notre série, 97% des patientes avaient bénéficié de ce traitement en cas de traitement chirurgical.

Au Niger, grâce à l’implication des autorités politiques, des prestataires, des Ongs, la gratuité de la prise en charge des cancers gynécologiques et mammaires est effective depuis novembre 2007. Les centres de traitement des cancers sont au Niger sont surtout les Hôpitaux Nationaux, la Maternité Issaka Gazoby de Niamey et les Centres Mères Enfants. Les soins prodigués sont : la chirurgie, la chimiothérapie, l’hormonothérapie et les soins palliatifs, à titre gratuit. La radiothérapie est réalisée hors du pays, gratuite, en cas d’évacuation sanitaire par le Conseil de santé de notre pays.

3.2. Traitement préventif 

3.2.1. Prévention primaire

Le cancer du col utérin est actuellement une maladie évitable. La prévention primaire du cancer du col utérin repose essentiellement sur des modes de vie saines et sur la vaccination contre le VPH. Deux types de vaccins contre l’infection par le VPH sont actuellement commercialisés : l’un de quadrivalent a neuf valent et l’autre bivalent. Ces deux vaccins existent et sont prescrits dans nos régions à titre individuelle aux populations cibles par les prestataires.Le Niger, grâce à l‘appui des autorités politiques, des partenaires au développement (UNFPA), le fond Gavi et la Fondation Tattali Yali de la 1ère Dame, a achevé une étude pilote de vaccination de masse en 2015 et est passé à une phase d’extension dans la vaccination de routine des jeunes filles.

3.2.1. Prévention secondaire

La prévention secondaire du cancer du col utérin à travers le dépistage et le traitement précoce des lésions précancéreuses est pratiquée dans tous les pays de la sous région. Les principales techniques utilisées sont l’examen cytologique des cellules du col de l’utérus (FCV), le dépistage de l’HPV, la colposcopie, le dépistage par examen visuel du col de l’utérus (IVA/IVL) et la biopsie du col utérin. Au Niger, le dépistage par la méthode IVA/IVL est gratuit. Des centres de dépistage existent dans presque toutes les régions du pays. Des campagnes de dépistage sont réalisées régulièrement grâce à l’appui des autorités politiques, des partenaires techniques, des Ongs et des sociétés savantes dans toutes les régions, en direction de la communauté rurale.Le traitement des lésions précancéreuses du col utérin par la cryothérapie, par la résection à l’anse diathermique (RAD) est simplifié, et se fait dès la première visite pour éviter les patientes perdues de vue dans certains pays de nos régions

La prévention secondaire du cancer du sein se fait dans nos régions par la mammographie et la palpation des seins. Au Niger, le dépistage par la mammographie (individuel, de masse) est gratuit.

CONCLUSION

La situation du cancer dans nos régions est préoccupante compte tenu que la plus part des pays n’ont pas les infrastructures et les équipements nécessaires pour mener à bien un traitement du cancer exigeant la chirurgie, la chimiothérapie et la radiothérapie et que les patientes sont admises à des stades tardifs de la maladie. Nous constatons également une grave pénurie de spécialistes du cancer tels que les chirurgiens oncologues, les anatomopathologistes, les chimiothérapeutes et les infirmiers spécialistes en oncologie pour les soins. Le pronostic des patientes est mauvais en général, même si des progrès sensibles sont enregistrés dans le dépistage et traitement précoce des cancers du sein et du col utérin. La prévention primaire du cancer du col utérin, par l’introduction de la vaccination HPV, dans nos régions permettra de renverser la tendance actuelle du cancer du col utérin. Mais en attendant,  pour améliorer la prise des patientes, il est urgent de :

  • Investir dans le cancer : meilleur implication politique pour une gratuité des soins
  • Avoir un programme de lutte contre le cancer dans chaque pays : outil d’exécution de la politique nationale en matière de prévention et de lutte contre le cancer
  • Harmoniser la collecte des données : le registre du cancer doit être disponible et couvrir toutes les régions du pays
  • Créer dans chaque pays, un centre de traitement du cancer avec toutes les infrastructures et équipements nécessaires
  • Renforcer les compétences des prestataires dans chaque pays : formation des chirurgiens oncologues, des anatomopathologistes, des oncologues, des radiologues, des radiothérapeutiques et des infirmiers oncologues
  • Renforcer les laboratoires d’anatomopathologie existants (pour réaliser des examens biologiques) et en créer aussi dans les centres hospitaliers régionaux dans nos pays.
  • Rendre accessible les produits pour la chimiothérapie et les soins palliatifs
  • Introduire la vaccination de masse contre le cancer du col utérin dans tous les pays,
  • Pérenniser le dépistage individuel et de masse des lésions précancéreuses du col utérin par la méthode IVA/IVL et le typage viral
  • Doter toutes les centres hospitaliers régionaux de nos pays, d’un mammographe
  • Soutenir, créer des Ongs qui luttent sur le cancer
  • Impliquer la population, la communauté, les maris à la lutte sur le cancer

REFERENCES

  1. Organisation Mondiale de la Santé :

Prévention et Lutte contre le cancer : Une stratégie pour la Région africaine de l’OMS. Catalogue OMS/AFRO  AFR/RC 58/4 du 24 juin 2008

  • Ferlay J, Shin HR, Bray F, Forman D, Mathers C, Parkin DM.

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Globocan 2018. http://gco.iarc.fr/today/data/factsheets/cancers/23-Cervix-Uteri-fact-sheet.pdf

  • Organisation Mondiale de la Santé :

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